La maternelle en danger -prise de position du café pédagogique
Il n’est pas fréquent pour le Café de titrer de façon aussi alarmiste. Mais il n’y a pas de doute : la maternelle sera le premier gisement de postes où le ministère puisera dans les années à venir. La scolarisation à deux ans est condamnée. Celle à trois ans pourrait suivre.
Conséquence : les familles et les communes paieront pour scolariser les enfants avant 4 ans.
S’il est une règle sociologique qui s’impose c’est bien celle qui veut que les plus faibles soient les premières victimes des tensions à l’intérieur d’une organisation. C’est très clairement ce qu’on observe dans l’éducation nationale à propos des Rased et de l’école maternelle.
Les enfants suivis par les maîtres des Rased appartiennent souvent aux catégories les plus défavorisées. Ce sont eux qui sont touchés en premier quand il s’agit de récupérer des moyens, en l’occurrence 3 000 postes. Le gouvernement préfère supprimer l’aide spécialisée aux plus démunis que,par exemple, diminuer les dégrèvements fiscaux des familles utilisant les services d’accompagnement scolaires payant.
Très logiquement, c’est maintenant l’école maternelle qui est victime des économies budgétaires. En 3 ans, le nombre de postes affectés à la scolarisation des 2-3 ans a fortement baissé, les recteurs ayant pris l’habitude d’utiliser cette école comme variable d’ajustement. Leur éradication pourrait être totale dès la rentrée 2010. Mais plusieurs faits donnent à penser que la scolarisation à 3 ans, qui n’est pas obligatoire, n’est plus à l’abri. Le rapport Papon évoque un contrôle à l’entrée en petite section, le rapport Censi, une réduction de 2 années de la scolarité en France.
Or la France détonne avec la plupart des pays du monde qui ont choisi de renforcer l’enseignement pré-élémentaire. C’est que son efficacité est prouvée. En France, “les recherches ont systématiquement relevé un lien positif entre la durée de fréquentation de l’école maternelle et la réussite des élèves à l’école élémentaire, tant sur le plan des acquisitions que sur celui de la qualité des parcours scolaires” relève Bruno Suchaut, directeur de l’IREDU.
L’école maternelle est prédictrice de la réussite scolaire. B. Suchaut a pu identifier des compétences précises acquises en maternelle et qui, selon ses travaux, décident de l’avenir scolaire. ” Les compétences dans l’acquisition de la langue écrite, dans la structuration du temps et dans la construction du nombre à la fin de l’école maternelle déterminent les capacités attentionnelles des élèves à l’entrée au cycle III. Par ailleurs, ces capacités attentionnelles sont liées aux compétences en calcul mental qui elles-mêmes vont déterminer les futures acquisitions des élèves en numération et calcul à l’entrée au collège et, de façon indirecte, les compétences en compréhension. Ce dernier domaine étant central pour expliquer la réussite ou l’échec des élèves à l’entrée au collège… Les analyses montrent que les élèves sont d’autant plus armés à l’entrée au collège s’ils ont développé des compétences élevées dans certains apprentissages à l’école maternelle”.
Sa réduction serait également une catastrophe sociale. D’une part, une étude de la DEPP montre que les acquisitions en maternelle profitent prioritairement aux défavorisés. D’autre part, les systèmes de remplacement qui sont envisagés, type jardin d’éveil, seront payants et donc inaccessibles à ces publics.
Pour toutes ces raisons il est souhaitable que la mobilisation qui s’est portée sur les Rased bénéficie également à une école nettement menacée.
Le dossier maternelle
http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2008/Maternelle.aspx