Petit rappel sur ce droit dont bénéficie chaque enseignant-e.

Face à la multiplication des agressions (physiques, orales et même écrites) sur des collègues du département depuis quelques années, un petit rappel sur ce droit dont bénéficie chaque enseignant-e.

Principes

Le principe de la protection fonctionnelle est posé par l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, dont le premier alinéa dispose que : « Les fonctionnaires bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions, d’une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales ». Cette protection est justifiée par la nature spécifique des missions confiées aux agents publics qui les exposent parfois, dans l’exercice de leurs fonctions, à des relations conflictuelles avec les usagers du service public et qui leur confèrent des prérogatives pouvant déboucher sur la mise en cause de leur responsabilité personnelle, civile ou pénale.

La protection est due aux agent-es dans deux types de situations.

  1. Les agents publics bénéficient de la protection de l’administration contre les attaques dont ils sont victimes à l’occasion de leurs fonctions. Ainsi en dispose le troisième alinéa de l’article 11 : « La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant le préjudice qui en est résulté ».
  2. Les agents publics sont protégés par l’administration lorsque leur responsabilité pénale est mise en cause à l’occasion de faits commis dans l’exercice de leurs fonctions. Le quatrième alinéa de l’article 11, introduit par la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l’emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d’ordre statutaire, prévoit que « La collectivité publique est tenue d’accorder sa protection au fonctionnaire dans le cas où il fait l’objet de poursuites pénales à l’occasion de faits qui n’ont pas le caractère d’une faute personnelle ».

En dehors de ces hypothèses, les agents publics bénéficient d’une garantie contre les condamnations civiles prononcées à raison d’une faute de service. Le deuxième alinéa de l’article 11 dispose en effet que : « Lorsqu’un fonctionnaire a été poursuivi par un tiers pour une faute de service et que le conflit d’attribution n’a pas été élevé, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute personnelle détachable de l’exercice de ses fonctions n’est pas imputable à ce fonctionnaire, le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui ».

Dans quels cas demander la protection fonctionnelle ?

Les enseignant-es peuvent être soumis-es à différentes agressions : verbales, physiques… Il existe un certain nombre d’atteintes faites aux enseignant-es visées par la loi : menaces, violences, voies de faits, injures, outrages, diffamation, dénonciation calomnieuse…pour lesquelles l’enseignant-e peut porter plainte et doit même porter plainte (voir différents articles du code pénal : 433-5 ; 222-17 ; 222-12 ; 222-13 ; 226-10…) Ces agressions sont répréhensibles aux yeux de la loi et donnent lieu à des condamnations qui peuvent être fortement dissuasives. Toutes ces atteintes lorsqu’elles sont adressées à une personne chargée d’une mission de service public dans l’exercice de ses fonctions ouvrent droit à la protection juridique.

Il peut arriver qu’un-e enseignant-e soit mis en cause et que l’on ait porté plainte contre lui. Le quatrième alinéa de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit que la protection fonctionnelle est due à l’agent public qui fait l’objet de poursuites pénales pour des faits qui n’ont pas le caractère d’une faute personnelle, que l’infraction pour laquelle il est poursuivi soit intentionnelle ou non.

Comment demander la protection fonctionnelle : procédure à suivre

L’enseignant-e victime d’une attaque ou poursuivi-e devant une juridiction répressive pour faute de service doit en informer l’administration, son IEN. A ce titre il lui appartient de formaliser sa demande de protection par un courrier adressé au Recteur de l’académie sous couvert de sa hiérarchie. Cette demande doit être motivée et apporter toutes précisions utiles pour éclairer l’administration dans sa prise de décision. Spécialement, concernant les agressions physiques ou verbales, il s’agira pour l’enseignant-e victime de les signaler à son chef d’établissement ou IEN dans les meilleurs délais. Penser à renseigner également le registre Santé Sécurité au Travail . L’agent victime de ces faits, qu’il soit ou non en service et quel qu’en soit le lieu, devra pour se voir attribuer le bénéfice de la protection, établir le lien d’imputabilité au service (lien entre le dommage subi et ses fonctions d’agent). L’administration saisie d’une demande de protection devra dans toute la mesure du possible y apporter une réponse écrite. En cas d’acceptation du Recteur, l’administration devra indiquer selon quelles modalités elle envisage d’accorder la protection. Le service des affaires juridiques du Rectorat s’occupe ensuite des diverses modalités.

Dispositifs de la protection fonctionnelle

L’agent est libre du choix de son avocat. Si l’enseignant a déjà fait appel à l’avocat de l’autonome de solidarité, celui-ci peut le représenter au titre de la protection fonctionnelle. La prise en charge des frais d’avocat est assurée par le service des affaires juridiques. Toutefois l’administration n’est pas tenue de prendre à sa charge l’intégralité des ces frais, si les honoraires de l’avocat sont excessifs, elle a la possibilité de les discuter avec lui. L’assistance juridique est assurée lors de la procédure. Des autorisations d’absence rendues nécessaires par la procédure seront accordées.

Les actions de prévention et de soutien 

Les actions de prévention peuvent concerner aussi bien l’agent agressé que son agresseur. Ces actions sont mises en œuvre par l’administration selon des modalités adaptées au cas d’espèce et en fonction du contexte. Les actions dites de prévention et de soutien en faveur de l’agent peuvent intervenir afin d’éviter la réalisation d’un dommage pour l’agent ou après les faits d’agression, et visent à soutenir l’agent et à éviter toute aggravation du préjudice. Elles ont pour objet d’assurer la sécurité, le soutien et la prise en charge médicale de l’agent. Par exemple, l’administration est tenue d’apporter à l’agent le soutien moral qu’il est en droit d’attendre du fait des souffrances psychologiques causées par l’attaque dont il a été victime. Les actions de prévention pourront également prendre la forme d’interventions directes auprès de l’auteur des attaques. Ainsi, il pourra être envisagé d’adresser une lettre d’admonestation à l’auteur de l’agression, voire de convoquer celui-ci dans les locaux administratifs.

Pour conclure

Les enseignants sont souvent affiliés à une assurance professionnelle (Autonome de solidarité) qui fournit une assistance juridique équivalente à celle accordée au titre de la position statutaire de l’agent et qui a pour avantage d’être bien plus réactive.

En effet l’assistance juridique fournie par l’administration étant souvent à géométrie variable, il peut être intéressant de faire intervenir immédiatement son autonome de solidarité et son avocat. Il existe d’ailleurs une convention de partenariat entre la Fédération des Autonomes et l’Education Nationale.

Autant lorsqu’il est poursuivi que lorsqu’il est victime, l’enseignant bénéficie des qualités d’un certain nombre de moyens de protection dont la mise en œuvre est soumise à des règles. Mais bien souvent, les enseignants sont mal, peu ou voire pas informés de ces dispositifs. Et nos supérieurs hiérarchiques semblent parfois frappés d’amnésie partielle en ne vous rappelant pas vos droits. Il faut bien comprendre que la protection fonctionnelle ne peut vous être accordée que si vous en faites la demande personnellement, c’est à votre initiative.

Il est malheureusement constaté que la judiciarisation de certains événements scolaires est en pleine expansion : le nombre de plaintes en justice déposées par les parents d’élèves a quadruplé en 10 ans tandis que dans le même temps celui des plaintes des enseignants doublait. Les enseignants doivent pouvoir se défendre ! Nous n’avons pas que des devoirs, nous avons aussi des droits ! L’heure est venue de ne plus accepter les incivilités de tout ordre comme une fatalité. Des personnes compétentes sont là pour vous accompagner.

Références : Cet article est une synthèse de différents textes provenant de diverses sources. Articles du Code Pénal / Articles de lois / Articles divers de L’Autonome de Solidarité / Droits et obligations des enseignants, dossier MAIF / Circulaire FP n° 2158 du 5 mai 2008 (direction générale de l’administration et de la fonction publique)

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