Les évaluations nationales actuelles sont-elles au service des apprentissages ? Non. L’évaluation imposée des élèves (mais aussi des écoles et établissements), est l’outil d’un pilotage qui dépossède les acteurs et actrices de terrain de leur pouvoir d’agir.
« L’évaluation peut être la pire comme la meilleure des choses », rappelle Jean-François Chesné, coordinateur exécutif du Cnesco et docteur en didactique des mathématiques. Ainsi, les évaluations au plus près des apprentissages dans la classe, qui permettent de comprendre les cheminements et les procédures des élèves, sont les évaluations qui sont au service de leurs progrès. A l’opposé, les évaluations normatives que sont les évaluations nationales (elles évaluent les élèves au regard d’une norme) ne sont pas une aide pour leur réussite. Non seulement elles ne fonctionnent qu’en « juste ou faux », mais elles sont suivies d’un classement qui a des conséquences sur les élèves. Elles peuvent aboutir à des entraînements répétitifs sur des compétences fragmentées alors qu’il s’agirait d’ouvrir aux élèves les plus en difficulté un univers de sens et de compréhension.
Par ailleurs, les évaluations imposées deux fois par an en CP, puis à chaque rentrée jusqu’à la seconde, servent de plus en plus au « pilotage » de tout le système éducatif : les PE sont sommé-es de se concentrer sur les résultats chiffrés à améliorer. Les temps de concertation, tout comme les formations, sont centrés sur l’évolution de ces « indicateurs ». Le métier enseignant s’appauvrit, les injonctions sur des méthodes imposées se multiplient : la dernière en date est « l’enseignement explicite », qui est en réalité la méthode « d’instruction directe », très protocolisée, déployée au Québec sans résultat probant.
Depuis la mise en œuvre de cette politique de pilotage par les chiffres, si le ministère ne cesse de communiquer que les résultats progressent « nettement de façon notable » et qu’ils sont « très encourageants », la réalité est que les inégalités se sont accrues (inégalités REP+/Hors EP, et inégalités genrées). Les choix réalisés de la politique éducative depuis 2017 n’ont eu de cesse de creuser les écarts entre élèves, de laisser sur le bord de la route les plus fragiles.
La FSU-SNUipp continuera de proposer donc à la profession des publications, des stages et divers moments d’analyse collective, afin que chacun-e se fasse une idée claire de ce pilotage imposé et de ses conséquences. Pour la FSU-SNUipp, ces évaluations ainsi utilisées ne sont qu’un outil de communication pour la politique gouvernementale, ne servant ni la réussite des élèves ni la pratique des enseignant-es. Progressivement, et le plus massivement possible, participons au nécessaire abandon de ces évaluations standardisées pour qu’elles ne deviennent qu’un outil facultatif mis à disposition des équipes.
Article du café péda de Bernard Lahire, sociologue, directeur de recherche au CNRS : « L’obsession évaluative a détourné l’école de sa fonction de transmission des connaissances »
Une vidéo du chercheur Fabrizio Butera (UDA 2024), sur les évaluations et la différence entre évaluations normatives et formatives
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Une vidéo du chercheur Olivier Hamant (journée Riposte mars 2025) : quand les indicateurs sont transformés en cibles à atteindre, ils deviennent toxiques :
Hamant https://youtu.be/JsOhReUCgjI
Le 4-pages à partir du colloque « L’évaluation dans tous ses états », 2ème édition, mis à jour en juillet 2025.