Lors de son intervention du 10 décembre 2017, le ministre de l’éducation nationale a pris une position « personnelle » sur la question des mères voilées qui accompagnent des sorties scolaires. Il a affirmé que le principe de neutralité religieuse devait s’appliquer à elles. Professeur de droit, ex-recteur de l’académie de Créteil, Jean-Michel Blanquer n’est pourtant pas sans connaître le contenu du livret laïcité (http://cache.media.education.gouv.fr/file/laicite/95/8/2015_livret_laicite_491958.pdf) paru en octobre 2015 et qui complète la charte de la laïcité à l’Ecole de 2013 : (http://www.education.gouv.fr/cid95865/la-laicite-a-l-ecole.html).

Dans ce livret il est notamment rappelé que « les parents accompagnant des sorties scolaires ne peuvent être considérés comme des agents auxiliaires du service public et soumis aux règles du service public. Dès lors, le principe est qu’en tant qu’usager du service public d’éducation, ils ne sont pas soumis à l’exigence de neutralité religieuse. […] »

En complément de la loi du 15 mars 2004, une circulaire en date du 18 mai 2004 précisait que l’interdiction du port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles et établissements publics d’enseignement ne concernait pas les parents d’élèves.
Quant à elle, la circulaire de rentrée de 2012 dite Chatel recommandait « de rappeler dans le règlement intérieur que les principes de laïcité de l’enseignement et de neutralité du service public sont pleinement applicables au sein des établissements scolaires publics. Ces principes permettent notamment d’empêcher que les parents d’élèves ou tout autre intervenant manifestent, par leur tenue ou leurs propos, leurs convictions religieuses, politiques ou philosophiques lorsqu’ils accompagnent les élèves lors des sorties et voyages scolaires ».

Saisi en septembre 2013 par le Défenseur des droits qui faisait état de « zones d’ombre » sur le texte de la circulaire, le Conseil d’État rend un avis stipulant que les parents sont de simples « usagers », n’étant ni « agents » ni « collaborateurs » du service public, seuls concernés par « les exigences de neutralité religieuse » auxquels les parents d’élèves ne sont pas légalement soumis. Seul le « trouble à l’ordre public » pouvait alors motiver des exceptions. A cette occasion, le SNUipp-FSU avait déclaré que « la laïcité doit favoriser la participation de toutes les familles » : https://www.snuipp.fr/la-laicite-doit-favoriser-la

Sur cette question, le TA de Montreuil avait en 2011 rendu un jugement favorable à une décision de refuser qu’une maman voilée accompagne une sortie scolaire. Le TA de Nice a pris en 2015 une décision inverse en s’appuyant sur l’avis du conseil d’Etat.

Les déclarations du ministre, qui affirme également sa volonté de considérer les parents d’élèves comme des « collaborateurs bénévoles du service public » afin de leur imposer cette neutralité religieuse, risquent de troubler les enseignant-es qui composaient sereinement, depuis l’avis du Conseil d’Etat, avec tous les membres de la communauté éducative.

Le SNUipp-FSU rappelle que les pratiques enseignantes montrent qu’il est tout à fait possible à la fois de faire respecter les principes de laïcité en bannissant tout prosélytisme et de favoriser la participation de toutes les familles.

Pour plus d’information, l’expression du SNUipp-FSU à l’occasion du 9 décembre 2017 https://www.snuipp.fr/actualites/posts/laicite-encore-du-chemin-a-parcourir